Diagnostiquée autiste asperger en 2013, Coralie Adato a longtemps cherché son chemin avant de poser des mots sur ses maux. Dans un récit authentique et touchant, la jeune femme raconte son histoire dans une chronique inédite estivale à suivre tous les vendredis sur Talentéo. 

Dans ce troisième épisode, Coralie nous parle des préjugés. Pour relire les précédents épisodes, rendez-vous ici et .

Les préjugés au quotidien

Je n’en rencontre pas tant que cela car je suis en marge. Cependant, il est vrai qu’il est difficile de dire que l’on ne travaille pas alors que l’on travaille, mais … différemment ou bénévolement.

Je n’ai pas une vie de famille lambda, je n’ai pas d’enfant. Je suis souvent celle qui ne peut pas « comprendre ce que c’est que de vivre une vie normale ». Oui bon, mais est-ce que les gens peuvent comprendre ce qu’est une vie qui ne l’est pas ?

Les gens connaissent peu d’autistes adultes. Ils ont une image faussée de l’autisme et arrêtée sur l’enfance. Par conséquent, c’est très difficile de casser les préjugés lorsque j’annonce que je suis autiste en énonçant mes besoins dans certains contextes. Les gens ont vite fait d’oublier. Ils pensent que c’est à moi de m’adapter à leur fonctionnement : sauf que je ne le peux pas. C’est une sorte de mise à l’écart implicite, mais effective.

L’autisme et la mémoire

Je n’ai pas une mémoire exceptionnelle dans le mode du « par coeur ». Je pense que c’est dû en partie à mon ancien parcours médicalisé et à mon traumatisme crânien car elle était meilleure dans l’enfance.

Par contre, j’ai une très bonne mémoire des mécanismes, des situations dans lesquelles je me suis trouvée, des environnements que je traverse. Les détails « anodins » se bousculent souvent dans ma tête. Je n’oublie rien non plus des conversations qui ont un sens pour moi. Souvent « on » pense qu’un autiste est forcément capable de mémoriser dix pages de poésie ou de musique. Ce n’est évidemment pas le cas de tous les autistes.

« Tu n’as pas l’air autiste »

Bien sûr, subsiste aussi le sempiternel : « t’as pas l’air autiste » ! Bon effectivement, je n’ai pas l’air …je suis autiste. Je suis ravie que cela ne se « voit » pas car cela me protège de certaines discriminations que vivent certains handicaps visibles ou différences visibles.

D’un autre côté, je dois toujours rappeler que je fonctionne différemment dans les lieux où j’ai besoin de rester et d’évoluer. Si l’accueil est satisfaisant, j’arrive à trouver mes repères et à m’intégrer à peu près pour poursuivre mon apprentissage.

J’ai un bon humour et cela aide. Je prends souvent les phrases au pied de la lettre, ce qui génère souvent quelques confusions qui donnent le sourire aux autres. J’en ris aussi, une fois la stupeur passée.

L’autisme et les activités : l’Eloignée

Les quelques personnes que je côtoie, dans le cadre de mes activités, savent que je n’aime pas sortir en groupe, aller dans des bars ou fêtes. Ils ne savent pas toujours que c’est en raison de mes difficultés à suivre plusieurs conversations à la fois, du bruit connexe ou de ma fatigue en fin de journée. Ils savent que je suis autiste et respectent mon retrait. Je participe au groupe à la mesure de mes possibilité : dans le contexte artistique uniquement. Je me sauve pour le reste.

Etant assez « passe-partout » physiquement, je n’attire par les regards. Ainsi, j’évite, je pense, certaines discriminations que d’autres peuvent vivre.

Je n’oublierai cependant jamais l’enfer que m’ont fait vivre certains collègues et supérieurs hiérarchiques de travail et pour cela, je suis heureuse d’avoir quitté aussi ce cadre  loin-des-petites-cases-je-vis … je reste « l’Eloignée »

Les autistes n’ont pas toujours quelque chose « d’extraordinaire »

J’ai besoin d’un bon sommeil. Je dors très peu et mal car je suis saturée des détails prégnants de la journée. Le moindre bruit me dérange ou me réveille. Je me retrouve donc fatiguée, et j’ai besoin de plus de repos que beaucoup de personnes dans la journée. Je dois dormir seule dans une chambre calme et bien sombre.

Mon emploi du temps journalier et hebdomadaire avec une vision mensuelle est clairement établi. En période de confinement, j’ai eu beaucoup de mal à ré-instaurer de bons repères. Mon alimentation et mon sommeil en pâtissent. Mon moral aussi, mais je pense que pour les autres c’est pareil. Les autistes n’ont pas toujours quelque chose « d’extraordinaire ».

J’ai un besoin fondamental de couleurs naturelles et de nature. Je passe énormément de temps à observer la vie d’un jardin. Ces vies minuscules qui se côtoient sont ma meilleure thérapie !

Mon alimentation est strictement biologique, végétale, sans mélange sucré-salé et très simple. J’ai un besoin de couleurs dans mon assiette et d’un certain jeu de textures. Je n’aime pas manger ce que les autres préparent ou je dois assister scrupuleusement au repas. Je dois manger en lisant et j’aime manger seule. Cependant, je fais quelques efforts pour deux trois personnes très proches qui me connaissent et qui font aussi de gros efforts pour moi aussi.

J’ai besoin de calme et d’être loin souvent des humains. J’ai construit mon petit monde intérieur, j’aime cela. Je réponds peu au téléphone et je n’ai pas de sonnette. Je communique en direct le moins possible.

A suivre …

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