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Grâce à son sketch sur le handisport et son personnage de Sylvain, un jeune adulte concerné par la trisomie 21, Artus réussit à changer la manière de parler du handicap en y mettant une bonne dose d’humour noir. Et, à sa grande surprise,  le public adhère.  Cet été, il réalise son tout premier film, avec en comédiens principaux, des personnes en situation de handicap mental. Rencontre.

Cet été, vous réalisez votre premier film où figurent au casting 80 % de personnes en situation de handicap mental. Pourquoi avoir voulu monter ce projet ?

Artus : "Je veux montrer que l'on peut rire autour du sujet du handicap !"Pour montrer un handicap peu visible. Certes, il y a de plus en plus de films, de fictions, comme Lycée Toulouse-Lautrec sur TF1 où sont mises en scène des personnes en situation de handicap. Cependant, c’est souvent du handicap physique ou qui « ne dérange pas trop ». Le handicap mental ne me semble que peu représenté ou alors qu’au travers de la trisomie 21.

Ce n’est pas la seule ambition : je souhaite aussi faire un film drôle, montrer que ces personnes le sont aussi et qu’on a le droit de faire des vannes sur ce sujet. J’avais aussi envie de tourner avec ceux qui sont concernés. Je pense que le tournage sera très particulier. Vont en ressortir des moments de joie et d’émotion que je n’aurais pas vécus avec des comédiens valides.

De quoi parle-t-il ?

Mon personnage fait un braquage avec son père. Lorsqu’ils sortent de la banque, à la place de leur voiture qui était garée sur une place handicapée, se trouve un car, qui emmène des gens en situation de handicap en colonie de vacances. C’est là que pour se cacher, le protagoniste a l’idée de se faire passer pour l’un d’eux.

Allons-nous retrouver Sylvain, un jeune concerné par la trisomie 21 que vous incarnez sur les réseaux sociaux ?

Oui. Ce n’était pas prévu à l’origine du projet, mais vu l’engouement qu’il suscite sur les réseaux, cela aurait été dommage qu’il ne soit pas là. Dans la rue, on m’interpelle aussi bien en m’appelant Artus que Sylvain.

Comment avez-vous casté les comédiens ?

J’avais mis une annonce sur Instagram. Au début, m’ont été proposées des personnes en situation de handicap déjà comédiennes. Dans mon film, il y en a deux ou trois qui font partie d’une troupe de théâtre, et deux qui sont journalistes au Papotin.

Je cherchais davantage des « gueules », des humeurs que des acteurs aguerris. Ainsi, je dois saluer l’énergie déployée par les éducateurs.

Ce sont eux qui ont envoyé les vidéos, qui ont emmené au casting les postulants en faisant parfois trois heures de route ou en portant des fauteuils lourds dans le métro. C’est fou. Ces personnes sont payées au lance-pierre et pourtant elles mettent toute leur vie dans leur travail.

Y a-t-il d’autres personnes, en dehors de l’équipe de comédiens, qui sont concernés par un handicap ?

Non. Peut-être une autre fois, pour un projet produit par ma propre production. Qui sait ! En attendant, j’essaie de faire changer les choses de l’intérieur et il faut savoir que ce film coûte déjà très cher. Chacun des dix à douze comédiens a besoin de deux accompagnateurs. C’est une grosse machine !

Avez-vous rencontré des obstacles pour monter ce film ?

Oui. J’avais déjà envie de le faire il y a 5 ans. À l’époque, j’étais moins connu et le sujet faisait peut-être un peu plus peur qu’aujourd’hui. Depuis, je suis devenu tout de même plus légitime à faire des vannes là-dessus.

Comment avez-vous acquis cette légitimité ?

Au fil des années, le grand public a validé mon humour noir.

La première fois que j’ai interprété le personnage de Sylvain (ndlr :  lors de la 8ème édition des Duos Impossibles) j’ai vraiment pensé qu’une tornade d’insultes et d’injures allait déferler sur moi, tout comme la fois où j’ai joué le sketch sur le handisport où je parlais de « légumes ». Et bien pas du tout. Au contraire, la Fédération Française Handisport a partagé la vidéo du sketch sur sa page Facebook.

J’ai également rencontré des parents et des athlètes paralympiques (ndlr : Artus parraine les Jeux paralympiques) qui m’ont remercié et qui m’ont même encouragé à continuer à faire ces vannes.

D’ailleurs, si on considère les personnes en situation de handicap comme des personnes ordinaires, on a le droit de les vanner comme des personnes ordinaires. Si on ne les vanne pas, cela veut dire que déjà on les met dans une case et on leur parle comme à des chiots ou à des labradors.

Vous êtes parrain des Jeux Paralympiques, mais aussi de Handicap International. Comment avez-vous été amené à endosser ce rôle ?

Pour Handicap International, j’ai été contacté à la suite de mon sketch sur le handisport. Cela fait maintenant quatre ans. Ils ont, je pense, aimé ma façon d’aborder le sujet.

Ils n’interviennent pas en France, mais dans les autres pays. Si déjà en France, c’est compliqué d’être en situation de handicap, imaginez un peu en Iran, ou en Afrique.

Faites-vous dire à Sylvain des choses que vous n’osez pas dire vous-même ?

Oui, il peut se permettre plus de choses. Il n’a aucun filtre, mais il tourne toujours les choses de manières plus mignonnes. Quand je prends la voix de Sylvain, j’ai des tournures de phrases qui me viennent que je n’ai pas en tant qu’Artus.

Comment est-il né ?

J’étais en voiture avec des potes au Liban.  Un de mes amis a dû me lancer un « mais t’es con ou quoi ? » et je lui ai répondu avec ma voix de Sylvain « moi je suis con, mais toi t’es con ! ». Et on l’a gardé.

Cela vous dérange-t-il d’être un porte-voix des personnes en situation de handicap ?

Non, j’en suis fier. C’est une cause qui mérite d’être soutenue, de cette manière-là, avec ce ton, et cet humour. Je trouve cela bien aussi que ce soit un valide qui le fasse. On n’est pas obligé d’être en situation de handicap, pour les soutenir.

Pourquoi êtes-vous si sensible à ces questions ?

Je ne sais pas vraiment. Cela m’a toujours tenu à cœur. Déjà enfant, je voulais avoir pour métier « promener les enfants handicapés ». Je n’ai jamais compris pourquoi ils étaient mis de côté.

Une fois, j’avais invité à mon anniversaire, un ami autiste. Sa mère m’a appelé pour me demander si je l’avais fait pour me moquer de lui. Non, juste parce que je l’aimais bien.

Le plus triste, c’est que si elle me posait la question, c’est ce que cela avait déjà dû lui arriver. Je voulais changer ça et changer le regard porté sur eux.

Que reste-t-il à faire selon vous ?

Plein de choses. Il faut déjà arrêter de leur parler bêtement, en articulant… Il faut cesser de les considérer comme des petites choses fragiles.

Talentéo remercie Artus pour cet échange. Nous avons hâte de découvrir et de parler de son film dont le tournage débutera cet été. Restez connectés sur toutes nos plateformes et celles de l’humoriste !

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