Le mercredi 14 juin, le jury prestigieux du #FestivalTalenteo attribuait le prix « sensibilisation grand public » à Lili Sohn pour son blog « Tchao Günther ». Nous accueillons dans nos pages la jeune auteure qui a décidé de dédramatiser le cancer grâce à l’humour. Rencontre avec un talent !
Peux-tu nous présenter ton parcours ? Pourquoi avoir décidé de parler du cancer en BD ?
Tout a commencé quand j’ai découvert que j’avais un téton weird. J’avais 29 ans, j’habitais à Montréal et je travaillais dans le milieu du jeu vidéo. Je suis allée consulter plusieurs fois mon médecin de famille, elle ne trouvait rien. Par acquis de conscience, elle m’a envoyé faire une échographie. C’est là que Günther, ma tumeur de la taille d’une balle de ping-pong cachée sous mon téton, a été découverte. S’ensuit le menu maxi best off : mammographie, biopsie, annonce, IRM, scintigraphie…
Quelques jours après mon diagnostic, j’ai ouvert un blog BD pour raconter ce qu’il m’arrivait. J’ai commencé à dessiner mon quotidien de manière très humoristique et en couleur ! Je n’avais pas choisi d’avoir le cancer alors autant choisir comment le vivre ! Cela a été hyper thérapeutique parce que raconter aux autres a surtout été un moyen de m’expliquer ce qu’il m’arrivait et ainsi de mieux le digérer.
J’ai essayé de vulgariser le vocabulaire médical, de parler de mes émotions, mais surtout des choses très drôles que je voyais ou qui m’arrivaient : enfin réussir à avoir un chat, faire un enterrement de vie d’avant chimio, toucher la poitrine d’une strip-teaseuse pour me faire une idée de ce qu’allait devenir la mienne, se déguiser pour aller en chimio, avoir un médecin aussi vieux qu’Erode…
J’ai été repérée par un éditeur et une version papier de mon blog a été éditée à la Courte échelle puis chez Michel Lafon : La guerre des tétons en 3 tomes. C’était vraiment mon rêve de faire de la bande dessinée et, finalement, le cancer m’a d’une certaine manière, permis de le réaliser. Grâce à la BD, je suis passée à travers cette maladie.
Ton blog se nomme « Tchao Günther », que représente ce « personnage » ?
J’ai donné un petit nom à mon cancer : Günther. J’ai choisi une sonorité germanique parce que les dompteurs de bêtes féroces utilisent l’allemand pour donner des ordres, c’est plus efficace ! Et puis je lui ai dit tchao, tout simplement.
Penses-tu que l’humour est un bon vecteur de dédramatisation ?
Parler de mon histoire et de mon combat aux autres c’était me les raconter à moi-même pour mieux accepter la situation. Le dessin, les couleurs et l’humour ont rythmé mon quotidien, mes visites médicales, mes interventions chirurgicales comme un fil rouge qui m’a permis de garder la tête hors de l’eau. C’est grâce à ce mélange que j’ai pu dédramatiser, avoir du recul et me protéger. Je crois que chacun peut trouver sa propre thérapie.
Quels sont tes prochains projets ?
Avant ma chimio, j’ai préservé mes ovules parce que le traitement peut rendre stérile. En suivant ce processus médical j’ai découvert que je ne connaissais pas mon corps. Je me suis alors intéressée de plus près à mes organes : mon vagin, mon utérus, mes ovaires… Pendant un moment, je n’ai eu plus qu’un seul sein. Je me suis demandée « qu’est ce qui définit la femme ? »
J’ai donc débuté un nouveau projet : un guide décontracté de l’anatomie féminine dans le but de palier à ma désinformation. Cela se passe sur vagintonic.com et ça sortira en mars 2018 chez Casterman.
En parallèle je continue à travailler sur le sujet du cancer, notamment avec l’Institut Curie sur le projet « Chuis pas docteur » qui vise à vulgariser les termes médicaux du cancer. La première série de vidéo s’intéresse à la reconstruction mammaire.
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Redécouvrez la planche qui a séduit le jury du #FestivalTalenteo :
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